Pour Ferdinand Djouhony, chef du village de Tieny, à quelques kms de Man, il paraissait tout naturel de s’impliquer dans le combat pour l’élimination de la fistule obstétricale en Côte d’Ivoire. Lui qui se définit comme « un amoureux des femmes », puisque seul garçon d’une famille de 4 sœurs qui toutes n’ont enfanté que des filles.
« Quand j’ai été sensibilisé sur l’existence de la maladie de la fistule, cela a touché mon cœur et je me suis dit qu’il fallait que je m’engage aux côtés de l’AIBEF[1]. »
Après des formations dispensées par l’AIBEF, Ferdinand Djouhony, le chef du village de Tieny a commencé à parcourir les villages de la région de Man à la recherche de femmes qui souffrent de la fistule. À pied ou en taxi brousse, le leader communautaire Ferdinand Djouhony sillonne les villages, discute avec ses homologues chefs de village pour s’informer de l’existence ou non de femmes qui vivent avec la fistule. « Dans les villages, je me présente comme une bonne volonté qui a été marquée par la fistule et qui agit de sa propre volonté pour aider les femmes victimes de la maladie de la fistule. »
« Le travail n’est pas toujours facile, car il n’est pas courant qu’une femme vous dise j’ai la fistule puisque c’est la maladie de la honte et il y’a de la pudeur à en en parler. Il arrive fréquemment qu’on me refoule, qu’on me chasse de la cour, en plus d’être traité de tous les noms d’oiseaux. » On vous demande : « qu’est-ce que vous êtes venus chercher chez moi ? Qui vous a dit que ma femme est malade ? Vous êtes docteur ? Vous faites quoi ? « Voilà des propos qu’on nous sert souvent. »
« Face à de telles adversités, je garde mon sang-froid, puisque je sais pourquoi je me suis déplacé. Dans certains cas, il faut souvent insister, puisqu’on a déjà eu l’information sur l’existence de la fistule et à force de patience, les gens finissent par vous parler. », rencherit-il.
Après seulement deux campagnes de visites, Ferdinand Djouhony, chef du village de Tieny, a déjà à son actif la détection et le référencement de 88 cas de fistules qui ont été pris en charge et opérés. « L'une des acitvités de mobilisation communautaire, l'aparticulièrement marqué: « Il s’agit d’une dame qui a été répudiée par son mari qui lui a dit qu’il ne voulait plus d’une femme qui pisse tout le temps. La femme a ainsi été chassée du village et a dû aller s’établir ailleurs. Elle est alors tombée malade et son mari interpellé a dit qu’il ne voulait plus rien avoir à faire avec elle. Heureusement, elle a pu être prise en charge il y a quelques mois par une caravane. Elle a pu ainsi être opérée avec succès. »
L’organisation des caravanes de réparation de la fistule est un moment important pour le leader communautaire Ferdinand Djouhony, chef du village de Tieny, qui peut ainsi appeler et mobiliser ses autres collègues chefs de villages d’aider à remonter les cas de fistules dans leurs villages. Ferdinand Djouhony est convaincu qu’avec un peu de soutien sous forme de moyens de transport et d’encouragement financier, il sera possible d’intensifier la recherche active de cas de fistule.
Ferdinand Djouhony souhaite également l’enrôlement d’autres chefs de villages qui sont de plus en plus jeunes et peuvent ainsi être mis à profit à travers l’organisation des chefs pour intensifier la lutte contre la fistule, mais également, contre l’excision qui est source de problèmes pour beaucoup de femmes.
[1] Association Ivoirienne pour le Bien-être Familial